Vogica : la fin d'un système et d'un monde ?

Actualités - 28 sept. 2010

En apprenant la nouvelle rendue officielle vendredi dernier du dépôt de bilan de Vogica et que nous avons diffusé dès samedi dans notre Flash infos, certains opérateurs de la cuisine intégrée se sont peut-être réjouis, les plus acides la jugeant  logique, voire morale au regard de l’image sulfureuse véhiculée par la marque. Pourtant une analyse rapide montre qu’il ne s’agit pas de la fin d’un système, car :

1/ La défaillance de Vogica, qui a été placée en RJ depuis hier, est avant tout probablement une affaire de gestion de l’entreprise liée à des problèmes de production, et non de produits ou méthodes de ventes rédhibitoires à son existence. 

2/ Il n’est pas exclu que la société soit reprise et continue un chemin qui, de reprises en changement de parts actionnarial, a toujours été mouvementé au cours des 20 dernières années (lire aussi notre article de Plats de consistance : Vogica ou petite histoire d’une mauvaise conscience... )

  
Il s’agit encore moins de la fin d’un monde, car :
1/ La cuisine intégrée continue et continuera de se produire et se vendre selon les mêmes fondamentaux, même si ceux-ci évolueront dans leur forme et mise en œuvre au gré de la modernité technologique s’appliquant dans les usines, les magasins et les modes de communication (Internet aura tout de même démontré son impact sur l’image d’une firme).
 
2/ Il serait naïf ou hypocrite de croire qu’avec la fin de Vogica disparaissent entièrement les méthodes de ventes condamnables. Illusoire aussi de considérer abolie la mauvaise image dont sont entachés les cuisinistes auprès d’une partie du grand public et qui a valu les foudres de médias consuméristes (Que Choisir ?) ou audiovisuels (Capital sur M6), même si l’opinion est heureusement devenue moins défavorable. Car cela reviendrait à prétendre qu’elles étaient le seul fait de l’enseigne vosgienne, oubliant que Cuisine Plus a été autant décriée, notamment par les cuisinistes « tradi » effarouchés par l’arrivée des surspécialistes au début des années 1980 (dont le pionnier Spacial Cuisines). De fait, en dépit de discours marketing assurant sa réforme morale il y a quelques années (ce qui revient à concéder implicitement une approche clientèle équivoque auparavant alors qu’elle arguait du contraire), Cuisine Plus a du mal à se départir d’une image quelque peu sulfureuse. Celle-ci contraste d’ailleurs avec son succès réel sur le terrain - le principal du groupe Snaidero en France – et qui, les mêmes causes générant les mêmes effets - continuent d’agacer mais aussi de fasciner des magasins « tradi » de marques auto-proclamées probes, les incitant à reproduire les mêmes stratégies. Qui peut jurer que tous les points de vente de telle enseigne, ou que tous les adhérents du Snec appliquent scrupuleusement des méthodes de ventes irréprochables ?   
 
3/ Il serait enfin hautain et péremptoire d’estimer que la fin de Vogica était inéluctable, sous-entendant qu’elle était méritée en raison du tort que l’enseigne aurait causé seule à la cuisine. Ce serait oublier qu’en termes de communication, cette dernière est celle qui, avec plus tard Mobalpa et Ikea dans d’autres registres respectifs, aura le plus atténué le caractère anxiogène de l’achat cuisine, avec sa fameuse et mémorable campagne TV de la fin des années 1980 (« Mes parents ont acheté une cuisine Cagivo » prononcé par un ado hirsute et désabusé) qui lui aura assuré l’une des plus fortes notoriétés quantitatives du secteur 20 ans après, sans qu’aucune communication d’envergure ne soit organisée entre-temps. Ce serait aussi estimer que les dépôts de bilan et liquidations des dernières années (Cesa, Teisseire, FGV, Espalux, etc.) sont tout autant moralement mérités, déduisant que les fabricants français toujours en activité ne risquent pas le même destin funeste. Or, à l’exception des leaders que sont le groupe Fournier et la Salm, les chiffres semblent plutôt contrarier une telle assurance de pérennité (quel fabricant n’a connu aucun problème de livraison ?), comme le montre aussi l’absence de communication vers les cuisinistes, laissant aux acteurs étrangers, Allemands surtout, les meilleures chances de prospérer…  

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