Halloween ayant été fêtée cette semaine, le moment était de circonstance pour expliquer que la cuisine était auparavant intimement liée aux sorcières, dans son acception non seulement de préparation de repas à base de potions magiques et d’ingrédients peu ragoûtants, mais aussi de pièce du foyer… ardent, chaudron et cheminée obligent. Les notions d’émancipation, d’accessibilité optimisée et de création y étaient même déjà appliquées, alors qu’une certaine poupée jouait le rôle de thermostat et les autels servaient de plans de travail !
Les cuisines sont traditionnellement un territoire féminin. Dans bien des cultures et depuis des millénaires, la connaissance des végétaux comestibles et de leur efficacité combinée, la préparation des aliments et le talent culinaire sont perçus comme des compétences que les femmes se 
transmettent, ou qui leur sont naturelles. Une prédétermination supposée qui a fini par jalonner la vie des femmes d'obligations. La relégation des femmes dans la cuisine a réduit la confection des repas à une nécessité, une corvée. Pour égayer ce décor (ou peut-être en antidote aux injonctions) les femmes européennes inventèrent la poupée de cuisine, confectionnée à la main. Talisman populaire, elle empêchait les plats de brûler et maintenait le Mal à distance. Subrepticement, elles permirent aussi aux femmes de s'émanciper, en devenant sorcières plutôt que servantes.
Dans l'imagerie ancienne, la sorcière est souvent affairée dans sa cuisine, près de l’âtre. Pour les praticiens actuels, la sorcellerie du foyer (...) est affaire d'accessibilité ; il s'agit d'utiliser des ingrédients magiques que nous avons à portée de main. La sorcière moderne utilise épices et herbes pour ses sortilèges ou ses thés et des fleurs fraîches pour son rituel. Certains aliments sont employés pour guérir ou envoûter.
Alors que la sorcellerie se régénère en une source moderne de bien-être et d'éclats vibratoire pour soi et les autres, la cuisine est redevenue un lieu d'alchimie. Des herbes fraîches y sont suspendues, les cuisinières se muent en autel, les ustensiles de l'Art sont réunis et les recettes se transforment en sorts. Pour la sorcière d'aujourd'hui, la cuisine est un espace de création magique.
Extrait de Sorcellerie (2021, édition Taschen)
Visuels :
En haut à droite : Tablier magique de sorcière de cuisine (Aliexpress.com)
Ci-dessus : Cornelis Saftleven Une taverne de sorcière (1650)
Partager cet article
