Nevelt a déposé le bilan

Actualités - 25 nov. 2011

A force de nous asséner - comme si cela allait mieux nous faire passer la pilule ou le bouillon amer des mauvais docteurs de la crise financière - que la mondialisation avait rendu les économies nationales interdépendantes, on en a oublié que le même phénomène joue aussi à l’échelle des régions. Celle des Vosges en est une triste illustration dans le domaine du mobilier de cuisine dont elle était il n’y pas si longtemps un pôle aussi renommé qu’actif.  Retour en quelques dates : en 1945 est créée la MVM à Mattaincourt à l’initiative de Jacques Parisot et Franck Dumeste qui lancent la fabrication des buffets de cuisine en bois. En 1971, après avoir quitté la société Manuest (qui allait déposer le bilan quelques années plus tard et repartir en tant que Scoop avec les ouvriers), Maxime Breuil lance à Poussay l’entreprise ECB qui se spécialise dans les cuisines montées moyen-haut de gamme. En 1976, Patrick Lasry devient directeur général de la Scoop Manuest à Châtenois et deux ans plus tard, il fonde la société de distribution de cuisines Vogica. La marque vosgienne acquiert une forte image dans les années 1980 grâce des spots de publicité TV célèbres (« Mes parents, ils ont acheté une Cagivo », etc.), mais elle symbolise aussi les excès d’une politique commerciale agressive dans les magasins, devenant avec Cuisines Plus et Spacial Cuisine la cible des associations de consommateurs. En 2005 est montée l’entreprise Nevelt, fruit d’une réorganisation de l’activité industrielle de la MVM (menée par Jean Rousse au sein du groupe Parisot). Arnaud Dupuis, le gendre de Jean-Pierre Parisot, président de la MVM, en devient le PDG. Nevelt se situe dans la conception de cuisines montées qu’il entend vendre sous la marque Coelis. Afin d’amorcer la constitution d’un réseau de cuisinistes, les responsables lancent alors une campagne de publicité dans la presse professionnelle (cf. notre illustration). Développant une image de standing, ce positionnement rompt avec celui de fabricant de produits no name vendus en grande distribution associée à Parisot, leader français. 50 points de vente, dont une vingtaine d’exclusifs faisant suite au premier de Mozac près de Clermont-Ferrand, sont prévus à la fin de l’année… et qui ne viendront pas.

 

Retour au présent : le 8 novembre dernier, Nevelt a déposé son bilan devant le tribunal de commerce d'Epinal. Employant 130 salariés, elle était devenue depuis deux ans sous-traitant de Vogica, enseigne de VGC Distribution. La liquidation de cette dernière le 8 novembre 2010 (soit un an exactement auparavant !) avait entraîné une perte d’environ 1,5 million d’euros. Selon notre confrère L’usine nouvelle, Arnaud Dupuis, qui avait envisagé un temps de reprendre l’activité de cuisine montées de Vogica, projetait d’emménager dans les locaux récemment libérés de la société ECB, lui aussi mis en liquidation. Il y aurait investi environ 7 millions d'euros, mais faute de soutiens bancaires, il a du y renoncer. De son côté, William Ego, président de VGC Distribution, avait déclaré au Figaro en septembre 2010 que  « Nevelt s'est avéré incapable d'absorber les volumes de Vogica, Des retards se sont accumulés, qu'il n'a jamais rattrapés, ne livrant jamais la bonne qualité ou la bonne quantité. Rares sont les clients qui ont reçu une cuisine complète ». Et le journal de préciser : « les livraisons promises en huit semaines se sont décalées sur des mois, des pièces manquantes ont imposé des installations en deux, trois, voire quatre fois, faisant exploser les coûts de logistique de la société ». Cette interdépendance et ces défaillances en cascade vosgienne sont d’autant plus regrettable que les Français se disent prêts à payer plus cher leurs achats made in France (voir notre article de ce jour)…    

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