Mémoires d’espoir… d’un passé révolu

Actualités - 26 sept. 2023

La suite de ses exceptionnels Mémoires de guerre du « plus illustre des Français » est tout autant remarquable, Charles de Gaulle dressant le bilan de son action à la présidence de la République Française. Pétris d’intelligence et de clairvoyance, ses écrits montrent que la volonté de grandeur socioéconomique peut être assouvie et que les champs des possibles peuvent donner les meilleurs fruits à condition d’être bien semés et labourés. Extraits édifiants en chiffres et lettres.   

Sur la vocation de l’action politique :

« Aujourd’hui plus que jamais, (...) tout individu est constamment en proie au désir de posséder les biens nouveaux créés par l’époque moderne ; (...) parce que la rapidité et l’étendue de l’information font que chaque homme et chaque peuple peuvent à tout instant comparer ce qu’ils ont relativement à leurs semblables. Aussi est-ce là l’objet principal des préoccupations publiques. Il n’y a pas de gouvernement qui tienne en dehors de ces réalités. L’efficacité et l’ambition de la politique sont conjuguées avec la force et l’espérance de l’économie. » 

Ce texte étant rédigé en 1970, comment ne pas y voir l’intuition remarquable de l’avènement prochain de la consommation de masse et de l’effet  Panurge des réseaux sociaux ?   

Sur le redressement de la France :

« La fin de 1959 et les trois années suivantes marquent pour notre pays une sorte de triomphe de l’expansion dans la stabilité, alors que maints idoines tenaient ces deux termes pour inconciliables. Expansion considérable, puisque les taux d’accroissement du produit national brut seront : 5% pendant le deuxième semestre de 1959, 7,9 % en 1960, 4,6 % en 1961, 6,8 % en 1962, correspondant à l’avance annuelle de la production industrielle qui atteindra en moyenne 5,4 % et à celle de la production agricole qui dépassera 5 %. Stabilité éclatante, car les budgets de l’état seront tous bouclés en équilibre, la balance commerciale se réglera de mois en mois par un excédent constant, les réserves d’or et de devises dépasseront 4 milliards de dollars en 1962, les dettes extérieures à court et à moyen terme seront à la même date intégralement remboursées, la majoration annuelle des prix de détails et de gros n’atteindra pas 3,5 %. Quel succès serait plus évident ? Il aboutit, d’ailleurs, à une majoration effective de 4 % du niveau de vie des français, tandis que le chômage tombe à moins de 0,5 % de la population active. » (…)

Sur la dynamique industrielle :

 « Entre 1958 et 1962, nos budgets auront consacré aux investissements 75 milliards de francs lourds. Cela ne s’est jamais vu !

Jamais non plus un Français parcourant la France n’a pu y constater d’aussi grands et rapides changements. Et pour cause ! Des permis de construire sur 14 millions de mètres carrés - presque tous en province - sont accordés à l’industrie dont, en même temps, le nombre des entreprises est, par fusions ou concentrations, réduit d’environ 5000. » (...)

Sur l’Union européenne :

« De là l’adhésion à “l’Europe” vue comme une construction dans laquelle des technocrates formant un “exécutif” et des parlementaires s’investissant du législatif - la grande majorité des uns et des autres étant formée d’étrangers - auraient qualité pour régler le sort du peuple français. De là, aussi, la passion pour l’Organisation atlantique (l’Otan, ndlr) qui mettrait la sécurité, par conséquent la politique, de notre pays à la discrétion d’un autre. De là, encore, l’empressement à subordonner les actes de nos pouvoirs publics à l’agrément d’institutions internationales où, sous les apparences de délibérations collectives, s’exerce en toutes matières, politiques, militaires, économiques, techniques, monétaires, l’autorité suprême du protecteur et où nos représentants, sans jamais dire : “Nous voulons”, ne feraient que “plaider le dossier de la France.” De là, enfin, l’incessante irritation provoquée dans la gente partisane par l’action que je vais mener au nom d’une nation indépendante. »

Sous l’égide de pouvoirs publics désormais stables et cohérents, le pays travaille beaucoup et bien. (...) Il le fait, à cette époque, dans le cadre du IVe Plan qui tend à une forte expansion de la production française. Or, le taux moyen de 5,5 %, ambitieusement prévu pour l’accroissement de la production intérieure brute, sera nettement dépassé, allant jusqu’à 7,2 % en 1962, 6,3 % en 1963, 7 % en 1964, cela notamment en raison de l’activité industrielle qui, au cours de ces trois années, monte respectivement aux indices 122, 128, 138 par rapport à celui de 100 en 1959. Ce qui, pendant la même période, est réalisé chez nous au point de vue du taux de croissance en comparaison des autres, le Japon étant seul excepté, nous place bon premier entre toutes les grandes nations du monde, y compris les États-Unis, l’Allemagne, l’Angleterre et l’Italie. Jamais encore cela ne nous était arrivé. 

Grâce à cette réussite nationale, la consommation des ménages (...) est augmentée d’un tiers en 1964 relativement à 1959. En même temps, nos échanges extérieurs prennent un essor que la France n’avait pas encore connu. Dans le monde entier, sur les marchés et aux expositions, paraît, en fait de produit de France, tout autre chose que les objets de luxe qui était naguère presque nos seuls envois. Parmi les plus puissantes machines, les plus lourds engins et véhicules, les appareils les plus complexes, on voit les nôtres s’offrir partout, et souvent avec succès. Inversement, les étrangers commencent à considérer les Français comme des gens capables de se payer ce qu’il y a de mieux. »

Source : Charles de Gaulle, Mémoires (Ed. Bibliothèque de la Pléiade)      

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