Ikea, offensive obligée en France

Actualités - 19 oct. 2012

Pas de quoi faire la « une » des Echos, qui a bien d’autres priorités économiques à mettre en première page, mais les résultats 2012 et les ambitions pour les années suivantes affichées par Ikea, font tout de même l’objet d’un article conséquent dans la rubrique Services, en page 25 de l’édition du 17 octobre (un autre article, juste en-dessous, annonce que « Bo Concept, l’autre Scandinave du meuble, profite des difficultés d’Habitat »). Il faut dire que la conférence de presse annuelle donnée par l’enseigne jaune et bleue, leader de l’ameublement dans le monde et en France, est un rendez-vous important pour la presse s’intéressant à l’habitat, y compris, voire surtout dans ses aspects économiques. Notre confrère Philippe Bertrand entame ainsi son compte rendu par la formule employée par Stefan Vanoverbeke, directeur général Ikea France, pour résumer les performances du distributeur lors de son exercice 2012 clos le 31 août : « Un succès challengeant ».

 

Succès en effet, puisque les ventes ont quasiment atteint 2,5 milliards d’euros, après avoir progressé de 3,2 %, la moitié de cette croissance provenant de l’activité d’un nouveau magasin, ouvert à Caen début 2012. A périmètre comparable, Ikea France serait ainsi en progression de 1,8 % sur un marché national en recul d’autant en cumul sur les huit premiers mois de l’année en cours, ce qui signifie que la chaîne suédoise de 29 magasins gagnerait des parts de marché. C’était déjà le cas lorsque le marché avait progressé de 2,3 % en 2011 selon l’Ipéa, et qu’avec 17,8 % de PDM, Ikea avait creusé l’écart avec Conforama et ses 12 %.  

 

Les ventes ont été tirées par la cuisine, la chambre à coucher et la salle de bains, mais aussi par le site marchand de l’enseigne. L’essor de ce dernier vecteur est remarquable car il était pendant longtemps considéré comme marginal dans le développement de l’enseigne. De fait, ses produits, exclusifs, ne sont pas comparables sur Internet pour faire l’objet d’une concurrence à pression tarifaire ; de plus, le modèle historique de l’enseigne repose sur des magasins très grands attirant le chaland dans un rayon d’une dizaine de kilomètres, plus de cent parfois. Autre temps, autres mœurs : mercredi, Stefan Vanoverbeke a souligné que les ventes du site Internet d’Ikea France, générées par 92 millions de visiteurs, ont progressé de 20 % au cours du dernier exercice. « Elles représentent désormais l’équivalent d’un petit magasin, soit environ 50 millions d’euros ». Le pli est pris et afin d’aller plus loin, les dirigeants envisagent de tester le « click and collect » dans un drive, ce qui permettrait aux clients de sélectionner leurs achats sur le site web puis de venir les retirer des points relais de livraison « en zone urbaine, dans la Région parisienne ». Un moyen d’éviter la foule dans les rayons et la queue aux caisses le samedi… Pas moins de 52 millions de visiteurs ont en effet fréquenté les magasins  français Ikea lors du dernier exercice, un chiffre stable qui, selon Stefan Vanoverbeke, montre que « les affaires relayées par la presse n’ont pas eu d’impact sur l’activité », évoquant « les accusations d’espionnage de la vie privée de salariés et de clients » dont l’enseigne a fait l’objet et pour lesquelles « l’enquête suit son cours », précise Les Echos.

 

 

La partie « challenge » de la formule de Stefan Vanoverbeke est justifiée parce que l’enseigne suédoise doit poursuivre son développement malgré la croissance économique en berne et la baisse du moral des ménages en France. Le directeur général a maintenu l’ambition des objectifs de croissance annoncés il y a quelques mois : 20 % de part de marché d’ici trois ans, 40 magasins en 2020, 45 en 2025 avec le franchissement de la barre des 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires. A la fin 2013, le magasin de Bordeaux aura fini son vaste agrandissement de 10 000 m2 pour devenir le plus grand de la chaîne. Suivront des inaugurations à Clermont-Ferrand et Bayonne en 2014 ainsi qu’à Vénissieux l’année suivante, en attendant la concrétisation possible d’un projet à l’étude à Mulhouse. Ce maillage devrait permettre à son terme de placer tout Français à 60 kilomètres maximum d’un Ikea.

 

 

S’il tient son plan de marche,  le distributeur aura investi 600 millions d’euros dans des magasins français sur la période 2010-2015, auxquels se sera ajoutée une somme équivalente engagée par Inter Ikea Center Group (IICG), la filiale immobilière du groupe, créatrice de plus en plus souvent de centres commerciaux autour des surfaces de vente. De tels investissements en temps de crise peuvent impressionner. Ils sont toutefois à relativiser, en rappelant le fait que les besoins de croissance ou de simple entretien de position sont plus élevés à mesure qu’une entreprise est grande (un géant doit davantage se nourrir qu’un homme de taille normale). Comme le souligne pertinemment notre confrère du quotidien économique cité, cette « stratégie offensive répond peut-être aussi à une nécessité. En 2010, le chiffre d’affaires d’Ikea France progressait de 2,6 % en comparable, contre 1,8 % aujourd’hui, et en 2011 la fréquentation des magasins augmentait encore de 2 %. A l’évidence, l’expansion est aujourd’hui un moteur de croissance indispensable pour le géant suédois du meuble ».

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