Allons-nous vers un krach de l'immobilier ?

Actualités - 29 oct. 2010

Après avoir connu un essoufflement - bref, cf. plus loin dans le texte – les prix de l’immobilier sont repartis à la hausse dans de nombreuses agglomérations française. Les derniers chiffres révélés par les notaires traduisent même une accélération avec, en août dernier par rapport à août 2009, une progression de 10 % sur l’ensemble du territoire et de 13 % à Paris (où le prix moyen du m2 s’établit désormais à plus de 6 000 euros !). L’allégorie vient naturellement pour expliquer qu’une telle flambée risque de causer un effondrement, car elle se produit dans un cadre structurel mal adapté. De manière plus prosaïque, cette remontée des prix n’est pas tenable, en raison des écarts sans précédents qu’elle génère avec les revenus moyens des ménages, annonce Jacques Friggit, chargé de mission au Conseil général de l'environnement et du développement durable. Cet économiste statisticien juge ainsi qu’une baisse de 30 à 35 % d’ici huit ans est probable, hypothèse fondée sur des séries de chiffres depuis 1965 et sur les trois périodes principales qui se succédées comme suit :


De 1965 à 2000, mise en place du tunnel de Friggit
 
Entre 1965 et 2000, les prix de l’immobilier et les salaires des Français ont suivi des courbes de progression sensiblement parallèles. Le rapport entre les deux a évolué dans un intervalle de plus ou moins 10 %, formant le fameux tunnel de Friggit, qui a même corrigé le mouvement spéculatif sur l’immobilier de la Région parisienne et de la Côte d’Azur entre 1987 et 1991, freiné brutalement par la crise post-guerre du Golfe. Dès 1995, le niveau des prix est ainsi revenu en phase avec celui des salaires.  
2000 à 2008 : gonflement de la bulle et dérive à la japonaise du système
Cette saine parité est rompue à partir de 2000 lorsque les prix de l’immobilier s’emballent partout dans l’Hexagone et conduisant huit ans plus tard à un indice des prix des logements anciens supérieur de 70 % au tunnel de référence. Cette hausse vertigineuse est notamment attribuée par Jacques Friggit et de nombreux observateurs aux facilités de financement accordées durant cette période, à savoir forte baisse des taux d’intérêt et augmentation des durées d’emprunt (jusqu’à 30, voire 40 ans, et on évoque alors, non sans inquiétude, l’avènement d’un système à la japonaise où les crédits finissent par être remboursés par les enfants des contractants). Cette inflation est favorisée par le report massif sur la pierre des investisseurs échaudés par le krach boursier de 2000 (bulle Internet).
2008 à 2009 : la crise ? Quelle crise ?
Autrement plus sévère est la crise des subprimes déclenchée à l’été 2008 aux Etats-Unis et qui poussent quelques mois plus tard les banques françaises à fermer le robinet du crédit. La faiblesse des transactions immobilières qui en découlent génère une baisse des prix à la fin de l’année et laissent craindre un krach. Celui-ci est évité par le plan de relance de l’Etat (doublement du prêt à taux zéro pour l’achat dans le neuf, réduction d’impôt Scellier pour l’investissement locatif…) et la forte réduction des taux relancent les transactions et les prix dès mi-2009.
Deux scénarios pour demain
Jacques Friggit est clair : la déconnexion entre prix de l’immobilier et revenus des Français n’est pas tenable sur le long terme, alors que les ménages consacrent déjà 20 % de leurs revenus au logement, que le chômage a explosé et que les taux d’intérêt vont remonter. En se basant sur une (optimiste) augmentation des revenus de 1 % par an (hors inflation), il envisage deux scénarios : soit les prix des logements pourraient se stabiliser et être progressivement rejoints par les revenus d’ici quinze à vingt ans ; soit - et c’est selon lui l’hypothèse la plus probable – il y aura une baisse des prix des logements de 30 à 35 % en cinq à huit ans. D’autres économistes estiment a contrario que la pénurie croissante de logements maintiendra les prix à niveau élevé et que les transmissions de patrimoine, facilitées par la loi Tepa, vont gonfler le pouvoir d’achat immobilier de nombreux ménages dans les prochaines années. Dans tous les cas, reste à savoir jusqu’à quand la bulle alimentera-t-elle la bulle sans exploser…

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