Quand la cuisine radieuse avait droit de Cité

Actualités - 11 janv. 2022

Au milieu du siècle dernier, Le Corbusier et Charlotte Perriand combinaient leurs dons exceptionnels de visionnaires de l’habitat pour concevoir une nouvelle configuration de cuisine intégrée, préfigurant l'ergonomie et la fonctionnalité des modèles modernes. Un livre de référence et une brève vidéo d’Arte retracent les motivations de cette étape importante.

Le 31 août dernier, nous avons consacré une article (toujours consultable ici) au livre La cuisine. Mode de vie, de l’ombre à la lumière, publié aux éditions bruxelloises AAM, et remarquable tant par ses dimensions maniables que par son contenu, relatant comment et pourquoi cette pièce est celle qui a le plus évolué dans l’habitat depuis le début du XXe siècle.

Elle est aussi celle qui a fait l’objet d’une attention particulière dans la composition de la Cité radieuse de Marseille, œuvre majeure du célèbre l’architecte franco-suisse Charles-Édouard Jeanneret-Gris, connu sous le nom Le Corbusier. Cette résidence compte 337 appartements de 23 types différents séparés par des « rues intérieures » et un hôtel de 21 chambres.

Voici le chapitre qu’y consacre l’ouvrage cité :               

« Bien que son utilisation s’avérera limitée aux utilisations de Le Corbusier, la cuisine des appartements en duplex de la Cité radieuse de Marseille, apporte des innovations qui seront reprises, pour partie, par tous les architectes. Exposée au salon des Arts ménagers à Paris en 1950, elle est le “lieu de contrôle mécanisé du foyer” (Christian Dupavillon, Éléments d’une architecture gourmande). Elle est conçue comme un lieu semi-ouvert sur le living afin de favoriser la convivialité en “laissant à la ménagère la gentillesse de communiquer avec ses amis, avec sa famille” (Charlotte Perriand, Un art de vivre). Le plan de la cuisine est un carré de 4,80 m de côté. Le sol est couvert de linoléum d’un entretien aisé. L’exiguïté de l’espace permet à la ménagère d’avoir à portée de main tous les équipements de la cuisine en pivotant simplement sur elle-même. Un meuble bar, destiné au passage de la vaisselle, aux portes “coulissantes, silencieuses, glissant dans des rainures bakélisées, soustrait à la vue de la salle le désordre éventuel des tables de travail” (Techniques et architecture : l’art de la table, n°10-11). Sans fenêtre directe sur l’extérieur mais bénéficiant de la clarté des grandes baies vitrées de l’appartement, la cuisine est placée au centre de celui-ci, immédiatement après l’entrée depuis la “rue intérieure” commune aux appartements de l’étage. Cette disposition en second jour, qui transgresse la réglementation en vigueur, va faire jurisprudence.

Le Corbusier y concentre les équipements indispensables au fonctionnement de la maison : conduites pour les fluides, proximité sanitarisée avec la salle de bains et les toilettes, vide-ordures, casier donnant sur la “rue intérieure” servant aux livraisons des denrées achetées sur commande et à la livraison de glace de réfrigération. Cette solution est rendue possible par la mise en place d’un dispositif alors inconnu en Europe, mais répandu dans les grands immeubles américains : la ventilation mécanique contrôlée (VMC) qui sera appelée à un bel avenir. “À la ménagère, écrit Charlotte Perriand, d’avoir le sens de l’ordre comme un barman, aux ingénieurs d’assurer fait aspiration des odeurs et des fumées.” »

Une brève vidéo explique aussi la vocation fonctionnelle de la cuisine imaginé par la designer.  À consulter en cliquant sur le visuel d’Arte en haut à droite de cet article. 

J.B

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