Culture Cuisine : Le 21 mars, par décision du tribunal de commerce, vous avez repris les Cuisines Jean-Louis Morel, implantées en Bretagne. Quelle était la motivation de cette acquisition ?
Stéphane Tréboux, gérant de Cuisine Morel à Allinges : Nos deux sociétés se sont toujours partagé la France. Cuisines Morel de Savoie réalisaient 95 % de son chiffre d’affaires à l’est d’une ligne diagonale de Biarritz à Strasbourg, alors que les Cuisines Jean-Louis Morel de Bretagne réalisaient 98 % de son c.a à l’ouest. Lorsque nous avons été informés de leurs difficultés, nous avons craint qu’un repreneur crée une confusion néfaste, en développant une pratique commerciale pénalisant notre activité dans les magasins et sur les foires, en raison de l’homonymie de nos deux marques. Cette confusion se faisait déjà ressentir à nos dépens depuis que les Cuisines Morel connaissaient des difficultés, que les particuliers mécontents relayaient sans distinction en magasins et sur Internet. En octobre 2011, nous avons donc rencontré Jérôme Morel, directeur marketing de cette entreprise, afin d’évoquer cette situation et nos solutions pour l’éviter, au cas où son plan de continuation n’était pas accepté. Nos échanges ont été excellents.
Culture Cuisine : Quel est le coût de cette opération de rachat et quel est le chiffre d’affaires global de la nouvelle entité constituée ?
ST : Le tribunal de commerce a jugé pertinent notre projet industriel et commercial de reprise, étayé par notre expérience en la matière. En effet, depuis notre rachat il y a 14 ans, le chiffre d’affaires de la société Morel de Savoie s’est considérablement accru et ses effectifs sont passés de 25 à 70 salariés. L’acquisition des Cuisines Jean-Louis Morel porte sur le fond de commerce (l’usine de production) et trois magasins en propre d’une surface de 150 à 300 m2, pour un coût global de 350 000 euros que nous avons débloqués au tribunal. S’y ajoute un fond de roulement de 500 000 euros. Ainsi a été fondée la nouvelle société Cuisines Morel Bretagne dont 100 % des actions sont détenues par Cuisines Morel SN. Désormais, cet ensemble pèse plus de 17 millions d’euros de chiffre d’affaires, ce qui nous rehausse de plusieurs crans dans la hiérarchie des fabricants français de cuisines.
Culture Cuisine : Quelle est la suite prévue à cette acquisition ?
ST : Nous comptons appliquer la même modernisation de l’outil industriel en Bretagne que celle qui nous a conduits à renouveler 80 % de notre parc machines à Allinges et à obtenir ainsi une forte rentabilité. Ensuite, dans un délai d’un mois et demi, nous allons sortir une nouvelle collection de cuisines positionnées en entrée de gamme, qui sont demandées par les distributeurs des Cuisines Morel Bretagne. Ils souffraient jusqu’à présent de ne pas pouvoir répondre à de tels budgets restreints, alors qu’ils jouissent en revanche d’une offre d’excellente qualité en haut de gamme, avec des modèles laqués, en bois massif et de forme arrondie notamment. Cette extension ne change rien à ce positionnement élevé, ni à notre stratégie de complémentarité, notre marque savoyarde restant placée en modèles contemporains moyen de gamme. Cette complémentarité s’exprimera aussi naturellement en termes géographique et commercial, permettant de développer chacune des deux marques dans la grande moitié de la France où elle était jusqu’alors absente. Cette complémentarité va se produire de manière synergique et elle nous permettra de mieux mettre en avant notre production made in France. Cette notion est devenue récurrente durant la campagne présidentielle et elle s’exprime aussi sur le terrain, un nombre croissant de distributeurs se déclarant désireux de référencer une marque française en réponse aux demandes des consommateurs sensibles à cette question liée à la préservation de notre industrie. Il est déplorable que 12 fabricants français de cuisines aient disparu au cours des 5 dernières années, sans qu’aucun plan de reprises n’air été proposé ».
Propos recueillis par J.A
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