Ikea attaque la cuisine allemande

Actualités - 04 mars 2010

« Aujourd’hui, un tiers de l’ensemble des cuisines vendues en Suède ainsi que la moitié de celles qui sont achetées en Norvège proviennent de chez Ikea. En Allemagne, notre part de marché (…) atteint seulement 5%. En France, nous détenons environ 20 % du marché de la cuisine ». Voilà ce qu’a déclaré à propose de la cuisine Mikael Ohlsson, nouveau président du groupe suédois depuis septembre, au cours d’une présentation du bilan et des objectifs de son groupe à la presse allemande il y a quelques jours. Visiblement prompt à la polémique, Mikael Ohlsson a ajouté que son enseigne vendait pour 5000 € des cuisines aussi fonctionnelles et qualitatives que celles des marques allemandes dont « les prix sont compris entre 20 000 et 30 000 € ». Une affirmation en forme de très grosse exagération ressentie comme une déclaration de guerre, notamment par des marques comme Nolte qui font leur miel de l’autre côté du Rhin (et un peu chez nous aussi) avec des produits plutôt situés dans le bas du marché. Les propos du dirigeant d’Ikea sont certainement l’expression d’une forme d’agacement. L’Allemagne représente en effet le premier chiffre d’affaires dans le monde (15 %), devant les Etats-Unis (10 %), la France (10 %), le Royaume-Uni (7 %) et la Suède (6 %), mais ne se montre pas assez friande de ses cuisines. Preuve qu’une industrie puissante liée à une distribution bien organisée en ce domaine, qui ont ensemble mis au point depuis très longtemps des concepts commerciaux de cuisines de premier équipement, peut résister au géant suédois. Et démonstration que la situation française, où Ikea vendrait une cuisine sur cinq, est tout autant due à une faiblesse, industrielle et commerciale, qu’aux talents scandinaves.

 
Néanmoins, les industriels allemands voient peut-être aussi avec inquiétude la croissance d’Ikea. Sur leur marché, certes. Mais surtout à l’export. Elle risque de vite les gêner, notamment sur les « grands »  marchés européens comme la France et la Grande-Bretagne où le groupe suédois pourrait bloquer leur progression dans le marché du premier prix, c’est-à-dire là où la croissance est la plus forte. De plus, malgré la bonne santé de groupes comme Nobilia (+8,6 % en 2009) – cf. notre article du 04/02/2009 -, l’industrie allemande n’a pas connu une année formidable avec un recul de l’activité estimé à 10 % et une baisse des exportations d’environ 8 %. Des géants comme Alno (ex- 1er européen, désormais 3eme) sont en cours de restructuration. Au prix de 450 emplois supprimés, ce dernier réduit son activité sur son site historique de Pfullendorf, en Haute Souabe, au profit de Wellmann en Rhénanie du Nord-Westphalie, zone où l’industrie allemande est concentrée. Dans le même temps, les entreprises plus modestes souffrent comme E + K dont le dépôt de bilan a été annoncé le mois dernier. Très forte, l’industrie allemande n’échappe pas aux questionnements qu’impose la crise. Et si elle doit affronter Ikea, la période n’est pas la meilleure pour elle. Mikael Ohlsson le sait bien puisqu’il affirme que c’est toujours en période de crise que l’ogre suédois « est le meilleur. »

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